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- La lettre de Terre Burkina
- "Juste une pluie"
- Parole d'élève
- Lutte contre les grossesses précoces à l'école
- Des élèves racontent : "Nous correspondons avec le Burkina !"
- Une rencontre

Prochain numéro le 15 septembre 2018
En attendant, retrouvez-nous sur notre Blog et Facebook

Bonjour à toutes et à tous,

Encore quelques semaines avant les vacances, nous redoublons d'efforts pour permettre à tous les élèves parrainés de terminer l'année scolaire dans les meilleures conditions possibles, en particulier pour celles et ceux qui ont des examens. Certificat d'Etudes Primaires (CEP), Brevet d'Etudes du Premier Cycle (BEPC), Baccalauréat, diplômes universitaires et concours de la fonction publique, le mois de Juin correspond au début de la saison des pluies mais aussi au début de la saison des examens ! Parmi ces concours, le CEP, le BEPC et le Bac sanctionnent à la fois la réussite et la validation d'un niveau scolaire, mais ils permettent aussi d'accéder au cycle supérieur et de faciliter l’inscription dans les établissements, on parle de "concours d'entrée en 6ème" et de "concours d'entrée en seconde" par exemple. En simple, il faut obtenir ces concours et en plus avec une très bonne moyenne pour pouvoir avoir le droit d'aller plus loin dans ses études. Nous tentons de mettre les élèves concernés dans de bonnes conditions face à ces épreuves et surtout, nous croisons très fort les doigts pour eux !

Les premières pluies arrivent également, les semailles débutent : les premiers grains de mil sont enfouis à quelques centimètres sous terre, le plus souvent manuellement et à l'aide d'une petite binette pointue. Tous les villageois sont concernés par ces travaux champêtres, y compris nos filleul(e)s qui, dès les grandes vacances entamées, doivent assurer tous ces travaux, des semailles à la récolte. La majorité des Burkinabè vit des récoltes et cultive la terre autour de l'habitation familiale et dans des parcelles en brousse ; le petit mil, le sorgho, le maïs, le riz et les autres cultures vivrières (haricots, arachides, sésame, petits potagers...) représentent 85% des surfaces cultivées. Le reste concerne la culture de rente (coton et canne à sucre notamment.)
C'est donc parti pour plusieurs mois de labeur intense dans les villages. Nous souhaitons à toutes et à tous beaucoup de courage et la meilleure saison possible.


Dans ce numéro : nous reviendrons sur la saison des pluies, nous donnerons la parole à P.R., élève parrainé, qui nous parlera de son quotidien d'étudiant à Ouagadougou, nous reviendrons sur notre action de lutte contre les grossesses précoces à l'école, nous lirons les retours d'une classe de CE2-CM1 en France qui a correspondu, grâce à Terre Burkina, avec une classe du Burkina Faso et nous terminerons par l'interview de M. Yogo, directeur d'école.

Bienvenue sous l'arbre à palabre, prenons le temps d'une lecture, ensemble.

Anthony PATE, Président.

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Juste une pluie

"Une pluie, juste une pluie... C'est fou, nous ne sommes rien."
Ces paroles résonnent fortement dans nos esprits, c'était un soir au village, le rouge du soleil couchant emplissait l'espace. C'est le Chef du village qui a prononcé ces mots. C'était sinistre, presque morbide. Le silence qui a suivi a paru durer cent ans. Il fallait être doué pour enchaîner, ou alors il fallait simplement se taire, c'est ce que nous avons fait. C'était la fin de la saison des pluies, une saison catastrophique à entendre les vieux qui n'avaient pas vu cela depuis des dizaines d'années. C'était la fin de la saison des pluies, c'était l'année dernière vers la fin du mois d'octobre, sur le plateau central, au Burkina Faso.

Si nous abordons ce thème à cette époque, c'est parce que le mois de Juin voit souvent arriver les premières pluies. Cela annonce le début de la saison, de l'"hivernage", saison qui va s'étaler (sur le plateau) jusqu'à la mi-octobre environ. Le rythme approximatif de deux pluies par semaine devra être respecté si l'on veut espérer une récolte en céréales suffisante et une bonne reconstitution des nappes phréatiques. Malheureusement, ce rythme se fait rare à l'heure actuelle, le dérèglement climatique se fait beaucoup ressentir et les pluies sont désordonnées, imprévisibles : parfois trop abondantes, trop soudaines et provoquant des inondations, parfois trop légères,  trop diffuses, trop espacées et au final insuffisantes pour les cultures. En résumé, les gens dans les campagnes sèment peu après les premières pluies (en ce moment ou très prochainement) et l'entretien - très laborieux - des champs va durer jusqu'à l'unique récolte d'octobre. Il faudra alors récolter suffisamment pour manger pendant un an, jusqu'à la prochaine récolte.

Nous étions donc une "veille" de récolte probable, mais il manquait une pluie, le grain presque à maturité n'attendait que cela. Cette pluie n'est pas venue. C'était déjà une très mauvaise saison même avec cette dernière pluie, pas de quoi faire la fête: des grains atrophiés, des champs clairsemés, rien de formidable. Mais cette pluie n'est pas venue. La récolte fut donc catastrophique dans ce secteur, la "soudure" sera difficile. La "soudure", c'est le nom donné à cette période incertaine ou les greniers sont presque vides (ou déjà vides) et la prochaine récolte pas encore réalisée, elle peut durer quelques semaines, souvent plusieurs mois. C'est une période difficile, très difficile, on ne parle presque jamais de famine au Burkina, pourtant on s'en rapproche très dangereusement par moment durant cette période, l'insécurité alimentaire est particulièrement importante et quoi qu'il en soit beaucoup ne mangent pas à leur faim. C'est une période pendant laquelle il faut faire des choix, vendre du mil ou du maïs pour acheter du riz de piètre qualité mais en quantité, avoir une activité économique suffisante pour pallier ce que la nature a refusé de donner en quantité suffisante, trouver des solutions diverses et variées pour manger et nourrir sa famille.

L'état et les communes jouent également leur partition, la SONAGESS (Société Nationale de Gestion des Stocks de Sécurité) propose en suivant un protocole d'accord et après études, des denrées alimentaires à prix social : mil, maïs, riz, niébé. Ceci permet aux personnes les plus démunies d'accéder à ces produits de base.

Parmi les "stratégies" mises en place : voici quelques exemples. Solliciter la famille en ville ou à l’étranger, il faudra leur expliquer la donne et espérer recevoir un peu d’argent. Vendre des animaux, souvent élevés pour l'occasion, ces animaux ne sont jamais consommés par l'éleveur mais destinés à être vendus. Vendre les autres produits de la terre (légumes, fruits, ...) ils peuvent être vendus au marché mais il est souvent nécessaire de s'éloigner (en ville voire à l'étranger) pour espérer les vendre sur un marché où on en trouve en moins grand nombre, ce marché sera ainsi moins concurrentiel et les prix de ventes plus élevés. "Libérer" des travaux champêtres des jeunes de la famille pour les envoyer faire des petits boulots rémunérateurs en ville. Etc. L’agriculture vivrière laisse ainsi la place à une économie de subsistance où l'argent liquide reprend le dessus... Dans certaines limites, parfois des solutions plus drastiques sont appliquées, comme le rationnement, on mange moins, moins souvent et en plus petite quantité... Ce qui conduit souvent à des scénarios très éprouvants car ce rationnement aura lieu, de surcroît, pendant une période de travaux champêtres intenses et très fatigants.  Aucun coordinateur présent avec nous ce jour-là n'aura oublié cette anecdote. Nous rendions visite à la Maman d'une élève qui allait être parrainée, il s'agissait de la rencontre préalable au début de chaque parrainage, elle nous raconta l'une des solutions parfois employées en période de soudure, il s'agit de mettre beaucoup beaucoup de temps à préparer le repas du soir, si longtemps que certains des enfants s'endorment autour du feu avant que le repas soit prêt : quelques bouches en moins à nourrir ce soir-là...

"Une pluie, juste une pluie... C'est fou, nous ne sommes rien."


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Parole d'élève

Vous retrouverez cette rubrique à chaque numéro avec un élève différent.

P.R., étudiant à Ouagadougou a joué le jeu, on lui a demandé d'écrire un article. Sujet au choix, longueur au choix. Sans correction, ni modification, ni censure.

"Bonjour chers lecteurs,

Je réponds aux initiales de P.R et je suis un jeune étudiant burkinabé en Sciences Juridiques et Politiques (SJP ou droit). Dans mon journal, je vais vous parler de la situation des étudiants des Universités publiques de mon pays.

Je réside à Ouagadougou dans un quartier périphérique de la ville. Mon rêve est de devenir magistrat afin de contribuer à faire régner la justice dans mon pays où celle-ci n’a pas sa place. Mais les conditions dans lesquelles nous (les étudiants) recevons les cours sont désagréables et constituent un frein à mon rêve. Nous recevons nos cours au SIAO (Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou), qui est, l’une des Universités en question et qui, d’ailleurs, n’est pas une Université en tant que telle mais juste un endroit pour nous permettre de recevoir nos cours en attendant la construction de notre Université proprement dite nommée Ouaga II. Notre année scolaire n’est pas normale comme celle des Universités privées car il y a constamment des désagréments tels que des manques de salles pour suivre les cours, ceci dû à la forte densité des étudiants qui avoisinent 3000 étudiants juste pour la 1ère année de droit sans compter ceux de la 2ème, 3ème et 4ème année. Les cours sont souvent reportés à cause de certaines activités qui ont lieu chaque année dans la cour du SIAO. Avec un professeur, un micro et quelques baffles, qui sont constamment en mauvais état, pour un cours qui débute à 8h, il faut y être à 4h du matin, à l’université pour espérer avoir une place. En cas de léger retard certains étudiants sont obligés de suivre le cours debout et mon cas en est une parfaite illustration car mon domicile est à une vingtaine de kilomètres du SIAO. Avec une seule moto (mobylette), pour ma maman et moi, je suis obligé de déposer ma maman au boulot avant de m’y rendre tout crispé, et souvent on t’informe qu’il n’y a pas cours parce qu’il y a une conférence (SIAO). C’est avec le cœur désespéré qu’on rentre chez soi en attendant demain pour espérer avoir cours. Cela est mon quotidien.

Merci !

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Lutte contre les grossesses précoces à l'école.

Nous avions rendez-vous dans l'un des bureaux de l'Inspection Scolaire pour faire le bilan de l'année écoulée concernant les parrainages. C'était fin 2016.
Durant ce bilan pourtant largement positif, nous détaillions que quelques très jeunes filles avaient dû interrompre leur scolarité pour cause de grossesse.
Madame l'Inspectrice Scolaire s'est alors adressée à nous et nous a expliqué à quel point ce phénomène était gravissime par le biais de plusieurs exemples, voici l'un d'entre eux :
Une jeune élève avait accepté les avances d'un garçon car il lui procurait régulièrement des morceaux de savons parfumés (produits de luxe dans son foyer très pauvre). Elle tomba enceinte. Même si la jeune fille fut bien évidemment la plus en difficulté, le jeune homme ne fut pas en reste car les responsabilités doivent être assumées dans ces situations.
Deux enfants, encore à l'école, confrontés à d'énormes difficultés sociales et économiques et un bébé débutant sa vie dans des conditions sanitaires et sociales lamentables, voilà le bilan.
D'autres exemples suivirent, toujours aussi terribles.
Les raisons sont aussi complexes que variées : manque d'éducation sexuelle, ("je ne savais pas que c'était comme ça qu'on faisait les bébés'') manque de mises en garde, manque d'informations concrètes sur les conséquences à l'école, à la maison, dans la vie future en général, sur les conséquences sanitaires, financières, etc.
Tant d'informations à transmettre à un public si jeune et qui ne se sent pas forcément concerné. Tant de sujets à manier avec précaution.
Nous avons échangé longtemps ce soir d'octobre, et à l'issue de cette réunion est né ce projet. Dans ses grandes lignes.

Cette action a eu lieu en Juin 2018, tout s'est bien passé et l'ensemble du programme a été respecté : 36 écoles, 110 classes, soit plus de 6000 élèves concernés. Tous et toutes ont pu assister à la pièce de théâtre de sensibilisation. Cette pièce, drôle et abordable, fut parfaitement interprétée par la troupe des "Anciens de Koudougou". Drôle, certes, mais aussi terriblement concrète, le jeune public a pu être efficacement sensibilisé à la problématique et les diverses interventions avant, pendant et après la pièce furent décisives pour faire passer le message.
C'est ensuite les agents de santé qui sont passés dans toutes les écoles pour revenir sur le contenu de la pièce et parfaire la sensibilisation.

Cette action n'est pas quantifiable, pas évaluable dans son résultat, pas de chiffre, pas de statistique, pas de produit fini... mais nous y croyons dur comme fer. La précision de la pièce, le talent des artistes, la compétence des agents de santé et l'implication extrême de l'inspection scolaire et des enseignants feront changer les choses.
Et si, une seule élève, une seule, échappe à cet avenir souvent terrible, alors nous aurons réussi.

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Des élèves racontent : "Nous correspondons avec le Burkina !"

Depuis septembre 2017, la classe de CE2-CM1 de l'école Landrivaux d'Herserange a eu la chance de correspondre avec une classe de CM2 de l'école de Yaoghen-Ouézélé au Burkina Faso. Voici quelques retours des écoliers français sur cette belle expérience.

"C’est très bien de connaître une nouvelle personne d’un autre continent et je suis contente d’avoir une amie du Burkina Faso." (Camila)

"Cette expérience était extraordinaire. Ca m’a appris beaucoup de choses sur leur pays qui s’appelle le Burkina Faso et aussi sur leur région [quartier] qui s’appelle Ouézélé. Je ne savais même pas que ce pays et cette région existaient avant. Emilienne (…) et moi avons un point commun : nous aimons toutes les deux le football. J’ai appris le nom de son plat préféré, ça ne se prononce pas pareil qu’en français. J’ai appris que dans la classe de CM2 on doit passer un examen de fin d’année pour passer en 6ème. En primaire ça ne fonctionne pas pareil qu’en France. (…)." (Sarah)

 "J’ai bien aimé cette correspondance parce que je me suis fait une nouvelle amie au Burkina Faso (…). Elle m’a aussi donné une photo d’elle." (Noé)

 "J’ai aimé envoyer des lettres. On pouvait parler des sujets que l’on aime bien. C’était comme des SMS avec l’attente en plus. Grâce à cette activité, j’ai appris que des fois c’était mieux de parler avec des inconnus. (…) Ma correspondante a appris des choses et moi aussi. (…)" (Loris)

 « Grâce à ce qu’on a fait, on sait un peu plus ce qui se passe dans d’autres pays : de nouveaux noms de villes, connaître une personne qui ne vit pas de la même manière (son plat préféré, son école, etc), apprendre leur vie d’enfant… (…) Résumé : d’un pays à un autre, tout peut changer." (Thomas) 

"Ca m'a plu et elle m'a appris comment était son école et sa langue. Elle m'a aussi appris où elle habitait et sa nourriture préférée et aussi les noms et prénoms de ses parents. (...) Grâce à elle je me suis fait une nouvelle amie et c'est elle : SAFIETA. Je l'adore !" (Elsa)

"J'ai bien aimé parler avec des enfants d'un autre pays. C'était intéressant parce qu'on a appris des choses." (Kaël)

" Elle m'a montré son drapeau et elle m'a dessiné une fleur. Elle m'a dit qu'elle cultivait et qu'elle était commerçante. Et j'ai bien aimé, elle était très gentille avec moi. Je suis très contente de l'avoir eu comme correspondante parce qu'elle m'a montré beaucoup de choses sur son pays. Je ne suis jamais allée au Burkina Faso alors je suis très contente qu'elle m'ait montré et appris des choses. Elle est très belle. Un grand merci pour elle. Je suis très joyeuse." (Joana)

"Ca m'a plu de connaître d'autres personnes. J'ai appris leur langue et leur mode de vie et j'étais content." (Bilal)

"J'ai aimé les lettres de ma correspondante. Elle m'a dit que son plat préféré c'est les spaghetti. Ils marchent longtemps pour prendre de l'eau. Au Burkina Faso il fait très chaud." (Noam)

"Ca m'a apporté beaucoup de choses comme communiquer avec elle, j'ai pris du plaisir à la connaître. Son pays est le Burkina Faso et sa langue le moré. Et ça va me manquer. (Anaïs)

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Interview de Monsieur YOGO Tasséré Gustave, directeur de l'école Yaoghen Ouézélé.

Terre Burkina – Bonjour Monsieur Yogo, pourriez-vous commencer par me définir plus précisément votre profession ? 

Monsieur Yogo  Ici au Burkina, il y a deux types de directeurs d'école : les directeurs "chargés", et les directeurs "déchargés", qui ne sont pas en classe. Moi je suis un directeur "chargé", c'est-à-dire que je joue un double rôle, à la fois en classe et en direction. 

TB - Etes-vous à temps plein en classe ? 

M. Yogo - Oui, tout à fait. Et le travail de directeur est en plus. J'ai donc deux rôles, un rôle administratif et un rôle pédagogique.

TB - Et un directeur est "chargé" ou "déchargé" selon le nombre de classes, ou le nombre d'enfants dans l'école ? 

M. Yogo - Les directeurs sont déchargés à partir de 6 classes dans l'école. A partir de 6 classes on dit que l'enseignant est "instituteur principal", c'est-à-dire qu'il n'a pas de classe. Il est dans son bureau et il assure les tâches administratives et pédagogiques.

TB - Le niveau d'études est-il le même pour être instituteur et directeur d'école ? 

M. Yogo - Non, il y a un concours professionnel pour être directeur d'école, le concours professionnel des instituteurs principaux. Ce sont des IC (Instituteurs Certifiés) qui peuvent postuler, c'est-à-dire des instituteurs qui ont une expérience d'au moins 5 ans. S'ils ont le concours ils ont la direction d'écoles de 6 classes en charge, et ils n'ont plus de classe. Ils contrôlent les devoirs journaliers, les cahiers de roulement, les compositions...

TB - De manière plus générale, qu'est-ce qui selon vous fonctionne bien, dans les écoles primaires au Burkina Faso ? 

M. Yogo - Au niveau pédagogique, je trouve que cela fonctionne bien. Les enseignants préparent leurs cours, ils peuvent s'entraider. Par contre, nous n'avons pas été formés à la dimension administrative.

TB - Et si on se place maintenant du côté des élèves, à votre avis quelles difficultés peuvent rencontrer vos élèves ? 

M. Yogo - L'interférence linguistique pose souvent problème. A la maison ils ne parlent pas français, et quand ils arrivent à l'école, c'est la langue qu'ils doivent utiliser... C'est compliqué. L'apprentissage aussi peut poser problème : ils ne sont pas suivis à la maison. Souvent le soir ils rentrent, ils posent les cahiers et n'étudient plus avant de revenir à l'école le lendemain... C'est difficile.

TB - Qu'est-ce qui permettrait selon vous d'améliorer le système éducatif ? 

M. Yogo - Je dirais qu'il faut sensibiliser les parents,  pour qu'ils sachent que l'élève doit aussi être suivi à la maison et qu'ils doivent s'intéresser à ce qu'il fait en classe. Ils fournissent quelques fournitures aux enfants mais souvent le nombre de livres est insuffisant, il y en a un pour 3 ou 4 enfants, ils ne peuvent donc pas les emmener à la maison pour étudier. On manque aussi souvent de stylos et de cahiers. Les conditions de travail sont difficiles pour les enseignants aussi. Le fait pour moi d'être à la fois en classe et de gérer la direction, sans être rémunéré pour ça, par exemple. 

TB - Vous n'êtes pas rémunéré pour les tâches de direction ? 

M. Yogo - Non... les indemnités sont normalement de 6000 FCFA par mois (NDLR:9,10 €), mais depuis 6 ans on ne les touche pas.

TB - Puis-je me permettre de vous demander ce que vous pensez des parrainages de l'association Terre Burkina ?

M. Yogo - C'est très très intéressant pour les élèves, évidemment ! Continuez !